Avez-vous vu le film d’animation « Vice Versa » produit par les Studios Disney (titre original « Inside Out »), ? Il raconte l’histoire d’une petite fille à qui ses parents annoncent qu’ils vont déménager et changer de région. Elle doit abandonner ses amis et ses petites habitudes, ce qui la plonge dans une profonde tristesse… Les sentiments s’animent en elle et s’opposent. La JOIE se met de facto en avant à grands renforts de « ça ira mieux demain, demain est formidable … » et cherche à passer en force. Le moral de la petite fille se dégrade et il faudra que la JOIE accepte de perdre un temps son leadership pour que la situation se rétablisse. Je vous laisse découvrir comment, mon intention n’étant pas de « spoiler » ce scénario habile, bien ficelé et visible par tous publics.
La nature humaine a ses invariants et ses passages obligés. Le respect de la Courbe du Deuil modélisée par une psychiatre suisse au milieu du XXème siècle en fait partie. Nous avons tous vécu ces situations où face à une déconvenue ou une mauvaise nouvelle, nous passons invariablement par une série d’étapes. Autant de figures imposées qu’il nous faut reproduire dans un ordre précis : après le choc, le déni s’impose avant la colère, vient ensuite la tentative de négociation avant l’abattement, le creux de la vague… La reconstruction qui s’annonce est à ce prix et à ce prix seulement. C’est un principe universel qui s’applique aussi bien à un retard à un rendez-vous important qu’à la perte d’un être cher ou à une finale ratée par son équipe fétiche. La mécanique est connue mais souvent chahutée. Vouloir raccourcir ou sauter les premières étapes de la « descente » n’est pas sans conséquence et rend difficile la reconstruction. Dans certains cas elle est impossible. Un retour arrière a posteriori est nécessaire, c’est plus long et plus douloureux …
La situation de catastrophe sanitaire planétaire que nous vivons impose donc plus que jamais le respect absolu de ces règles de fonctionnement de la mécanique humaine. L’enjeu est considérable et les répercussions durables. Nous avons certes besoin des cellules de soutien psychologique mises en place mais il nous appartient également d’être vigilants et de conserver l’œil et l’oreille empathiques. Soutenons-nous les uns les autres ! Attention donc aux messages prématurés vantant les mérites et les opportunités de la reconstruction. Ils seront indispensables, mais le moment venu. On n’apostrophe pas une personne qui vient d’avoir un accident matériel sérieux avec son véhicule en lui disant la chance qu’il a de pouvoir acquérir un nouveau modèle plus récent et plus performant grâce à l’argent de l’assurance… Méfions-nous donc de nous-mêmes et de nos réactions à chaud et tout ira pour le mieux. Dans son ouvrage Commentarii de Bello Gallico, Jules César n’a-t’il pas raillé les Gaulois pour leur piètre capacité à rebondir en cas de malheur ? Il serait bienvenu de faire mentir Jules ! Vercingétorix m’a déjà twitté son soutien…
- Henri-Noël Guerif -
