Gaou Bénat : l’art de l’effacement architectural
Sur la côte escarpée des Maures, à Bormes-les-mimosas, se niche un trésor d’architecture insoupçonné : le Cap Bénat abrite en effet un domaine privé de 700 villas, quasi invisible à l'œil nu pour l’observateur non initié. Fruit de l’imagination de deux architectes ingénieux et visionnaires, André Lefèvre et Jean Aubert, le Gaou Bénat se fond dans les méandres de la roche et se dissimule harmonieusement derrière la végétation de pins et de chênes lièges. Ou quand l’architecture s’efface subtilement au profit de la nature.
Construit entre 1958 et 1975 selon un cahier des charges, précis et novateur, le domaine du Gaou Bénat prend le contre-pied de la construction massive et anarchique de maisons individuelles, alors en vogue sur une grande partie du littoral méditerranéen. Une alternative judicieuse avec pour objectif de concilier paysage, habitat et aménagement du territoire. Sur ses 160 hectares, le Gaou Bénat cherche avant tout à s’intégrer au mieux au site et à se fondre avec élégance dans l’environnement.
André Lefèvre et Jean Aubert conçoivent minutieusement le plan d'implantation, strict, favorisant une intégration harmonieuse de chaque bâtiment dans le paysage. Si aucun modèle standard n'est imposé, chaque maison étant unique, toutes respectent un certain nombre de règles : les toits-terrasses végétalisés, les murs en pierres sombres de Bormes et l'utilisation de matériaux naturels sont ainsi obligatoires et contribuent au leitmotiv de l’effacement. Aucun édifice ne peut dépasser 4,5 mètres au-dessus du sol naturel, ce qui conduit à enterrer partiellement les maisons.
Les habitations, de taille modeste, sont conçues de manière à préserver l'intimité de chaque résident, tout en favorisant la communion avec la nature environnante. Les terrains ne sont pas pour autant clos et les murs contribuent à l'isolement phonique et visuel des maisons. Diverses configurations sont envisageables, allant de simples blocs à des ensembles plus complexes organisés sur plusieurs niveaux et desservis par des escaliers extérieurs. Les intérieurs se composent de cuisines ouvertes sur les séjours, dotées de baies vitrées s'ouvrant entièrement sur les terrasses, ainsi que des chambres de petite taille souvent adossées à la pente à l'arrière.
Les panoramas marins sont privilégiés et l’orientation se préserve des vents dominants et des chaleurs accablantes quand vient l’été. Les toits-terrasses encouragent le développement d'espèces indigènes luxuriantes. Les principes constructifs simples, reflétés dans le règlement du lotissement applicable à l'ensemble du domaine, encouragent un art de vivre collectif.
Les concepteurs ont cherché à réduire au minimum les routes pour limiter la présence des véhicules. Chaque hameau est ainsi accessible par des chemins étroits suivant les courbes de niveau, permettant à peine le passage d'une voiture pour desservir les maisons. Les véhicules sont ensuite garés à l'extérieur du hameau. Les résidents se déplacent ainsi majoritairement à pied dans le domaine, empruntant un réseau de chemins piétons, souvent constitués d'escaliers, s'étendant jusqu'à la mer. Ce sont ces chemins, appelés les "gaous", qui ont donné leur nom à l’ensemble : le Gaou Bénat !
